Militer ? J’ai arrêté !

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Militer ? J’ai arrêté !

Sébastien, 28 ans, a milité pour un parti politique pendant 3 ans. Aujourd’hui, il a arrêté. Déçu du militantisme, il revient sur son engagement passé dans lequel il a rapidement trouvé certaines limites.

"J’ai commencé à militer pour un parti à l’occasion d’une élection nationale. J’ai continué à adhérer pendant 3 ans, mais quand j’ai décidé d’arrêter, je n’étais déjà plus très actif."

Militer, c’est souvent faire le sale boulot

"Militer pour un parti politique, c’est s'engager pour une grosse structure qui donne des ordres, qui dicte une façon d’agir et des choix : c’est assez militaire et pas très valorisant intellectuellement. Coller des affiches le soir ne m’a jamais passionné !

Ce dont j’avais envie quand je me suis engagé, c’était de faire de la politique en participant au débat d’idées. Or, ce n’est pas ce qu’on me demandait en tant que militant. Au début, j’étais seulement réquisitionné pour faire le sale boulot."

J’ai préféré militer au niveau local

"En tant que militant, j’ai déposé des tracts dans les boîtes aux lettres pour la présidentielle, puis j’ai continué à militer pour les élections municipales et locales. J’ai trouvé que ça avait beaucoup plus d’intérêt de faire du porte-à-porte pour un élu local, que je connaissais personnellement et qui défendait un projet pour ma ville, que pour une élection nationale. Lors d’une présidentielle, les gens sont déjà très bien informés par les médias, et les militants n’ont pas vraiment de valeur ajoutée. J’ai trouvé que militer ne servait à rien."

Pour militer, il faut parfois renier ses convictions

"On m’a proposé un jour, lors d’un meeting que le parti organisait dans ma commune pour les élections européennes, de prononcer un discours sur les jeunes et l’Europe. Le meeting tournait complètement autour du parti et de ses dirigeants plutôt qu’autour de l’Europe, qui était pourtant le sujet de l’élection ! Cela m’a vraiment agacé ! J’ai compris que la campagne était davantage un moyen pour le parti de compter ses forces pour la prochaine élection présidentielle que de débattre d’enjeux européens.

Dans le même temps, je commençais à être déçu par l’action nationale que menait le parti pour lequel je militais. C’était difficile de faire semblant de le soutenir et de tout cautionner alors que je me sentais moi-même trahi en tant qu’électeur. Mais malheureusement, pour militer, il faut parfois savoir renier ses convictions personnelles au bénéfice de positions qu’on ne partage pas."

Militer, c’est surtout faire du bruit

"Être militant politique c’est aussi être convoqué de toute urgence à plusieurs kilomètres de chez soi pour la venue d’un ministre, afin de rassembler du monde et de faire du bruit pour l’accueillir, sans même connaître l’objet de sa visite.

Ce que je n’ai pas trop aimé non plus en tant que militant, c’est de parfois devoir quasiment harceler les gens pour porter un message et leur imposer des idées. C’est bien beau de militer, de coller des affiches et d’avoir des convictions, mais il faut quand même garder les pieds sur terre : la politique ne fait pas tout et il ne suffit pas de voter pour X ou Y pour que la société change."

Je privilégie mes études au militantisme

"Quand on est jeune militant, il faut faire très attention de ne pas se laisser trop embarquer, de ne pas négliger son travail ou ses études pour une cause. On me sollicitait beaucoup pour des réunions le soir ou du tractage sur des marchés le samedi matin, alors qu’il fallait que je révise pour mes partiels.

Dans l’organisation pour laquelle je m’étais engagé, j’ai trouvé un milieu qui était assez cloisonné, ouvert en façade mais faussement accueillant. C’est aussi pour cette raison que j’ai fini par partir.

Au début, pour moi, militer dans un parti politique, c’était rendre service à mon pays. Mais j’ai compris depuis qu’il y avait d’autres manières de le faire, notamment par mon activité professionnelle. Je veux être avocat pour défendre les salariés et faire avancer la dignité humaine au travail. C’est pourquoi je privilégie aujourd’hui mes études au militantisme."

 

Afin de préserver son anonymat, le prénom de ce témoin a été changé.

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Article mis à jour le 03/07/2018 / créé le 05-11-2012