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Volontourisme : Partir faire du bénévolat à l'étranger pendant les vacances, bonne ou mauvaise idée ?
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Construire un puits au Cambodge, soigner des animaux en Bolivie ou enseigner dans un orphelinat à Madagascar... Vouloir se rendre utile pendant les vacances part d'un bon sentiment mais attention, les frais de participation peuvent vite grimper et l’intérêt pour les populations locales s'avère limité, voire néfaste. Enquête.
Volontourisme : plus d'un tiers des 18-30 ans déclarent donner bénévolement de leur temps en consacrant quelques heures pendant l'année à une association ou autre organisation au moins ponctuellement, selon le baromètre de la direction de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative. Un engagement qui se poursuit l'été, puisque vous êtes nombreux à vouloir "partir faire de l’humanitaire" pendant vos vacances.
Bénévolat : le boom des missions payantes
Surfant sur les bonnes intentions des volontaires, de nombreux organismes peu scrupuleux proposent du volontourisme (contraction de volontariat et tourisme) et en font un vrai business.
Les offres fleurissent sur internet. Pour partir en mission, bien souvent, aucun prérequis n’est attendu et la durée de l'engagement est à la carte variant de quelques heures à plusieurs semaines. "La sélection se fait uniquement sur l'argent" déplore Alexandre Giraud, directeur général de l'association Solidarités International, qui met en garde contre certaines pratiques. Les bénévoles doivent débourser entre 150 et 3 000 euros par mois pour une mission de bénévolat, sans compter le prix des billets d’avion. Des sommes conséquentes, très largement au-dessus du niveau de vie sur place, et pas toujours justifiées.
D'autant que certaines structures jouent sur la confusion et ne sont ni des associations ni des ONG mais ont bel et bien un but lucratif. "Renseignez-vous sur le statut de l'organisme" conseille Marie-Albane Ully de France Volontaires, une association qui informe et oriente les volontaires. "Certaines structures comme Project Abroad sont en fait des entreprises". Avant de vous engager, interrogez-vous sur la philosophie et les valeurs de l’organisme d’envoi et des structures partenaires locales et demandez-vous à qui profite les frais de participation.
Un business qui pose problème
Outre les dérives financières, l'utilité même de la mission pose parfois question. Une mission n’a de sens que si elle est durable et s’inscrit dans un projet à long terme : "Construire un panneau solaire ou un puits dans un village où il n’y a pas d'ingénieur pour le réparer s'il tombe en panne ne va pas aider le village à se développer" prévient Marie-Albane Ully, de France Volontaires.
Pire, l’impact peut même être négatif. "Les actions ponctuelles qui ne s’appuient pas sur les compétences de la population locale et induisent une logique de dépendance sont contreproductives" alerte Alexandre Giraud directeur général de Solidarités International. "L’aide humanitaire d'urgence est réservée aux situations extrêmes comme une guerre ou une catastrophe naturelle" explique-t-il. Dans un pays fonctionnel où la situation est stable on parlera plutôt d'aide au développement et dans ce cas "l'idée n'est pas de faire « à la place de » car cette logique peut être néfaste pour la dignité des personnes et leur autonomie" prévient Alexandre Giraud.
"Le volontouriste n’a pas forcément conscience de faire plus de mal que de bien" souligne Marie-Albane Ully. Pourtant, dans certains cas il participe sans le vouloir à un business qui nuit à l'économie locale et à la population. "Certaines structures vont même inventer ou mettre en scène la misère pour en tirer profit" explique-t-elle en rappelant l'affaire des faux orphelinats au Cambodge crées par des structures peu scrupuleuses pour attirer des touristes.
Aussi "il faut une vision globale et une bonne compréhension de la société afin de garantir une juste répartition de l’aide entre les différents groupes de la population et ne pas créer de déséquilibre en aidant un village plutôt qu'un autre précise le directeur général de Solidarités International Or ce n'est pas possible si l’action est ponctuelle et répond à une logique de profit" regrette-t-il.
Volontourisme : et si on inversait les rôles ?
Les missions proposées par certaines agences laissent penser que tout le monde peut aider sur le terrain, la réalité est autre. "Un engagement court de moins d’un an me paraît compliqué" prévient Alexandre Giraud. "Demandez-vous quelles compétences vous pouvez apporter aux populations locales ajoute le directeur général de Solidarités International. Le domaine de la solidarité internationale se professionnalise et a surtout besoin de compétences pointues en hydraulique, médecine, logistique, gestion de budget…" rappelle-t-il.
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"Ma nièce de 16 ans m’a appelé pour me demander conseil, elle souhaitait partir faire un chantier humanitaire à l’étranger cet été" raconte Alexandre Giraud "je lui ai conseillé d’attendre et de réfléchir aux raisons qui lui donne envie de partir. On part sur le terrain dans une logique d’engagement, de solidarité, pas pour attendre une reconnaissance" insiste-t-il.
Il faut aussi se mettre à la place de la cible et essayer d'inverser les rôles : "comment réagirait-on si des bénévoles péruviens non-formés venaient enseigner l’anglais dans des orphelinats en France ?" interroge Marie-Albane Ully.
Volontariat : comment trouver une mission sérieuse ?
Prix élevé, engagement à « la carte » de courte durée, vocabulaire accrocheur, absence de formation avant le départ, mission ponctuelle qui pourrait être réalisée par les locaux… En voyant une annonce certains éléments peuvent vous aider à repérer les offres publiées par des structures plus soucieuses de faire du profit que de la solidarité internationale.
"Sur notre plateforme nous relayons les offres de structures qui ont signé la charte des volontariats explique Marie-Albane Ully de France Volontaires. C'est un gage d'éthique, qui garantit des missions responsables" ajoute-t-elle. "Le site Coordination Sud (une association qui rassemble 170 ONG françaises, NDLR) publie des offres de missions et d'emploi" conseille de son côté Alexandre Giraud.
Enfin, sachez qu'il existe de nombreux dispositifs encadrés par l’État, c’est le cas du Corps européen de solidarité (ex-Service volontaire européen), du service civique à l'étranger ou du volontariat de solidarité international (VSI). Si vous partez dans ce cadre, on ne vous demandera pas de débourser de l'argent, au contraire, vous recevrez même en contrepartie une gratification.
Laura El Feky © CIDJ
Article mis à jour le 30-08-2018
/ créé le 29-08-2018
Crédit photo : Compte instagram @Barbiesavior