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Youdy, le plus court chemin entre les apprentis et les particuliers

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Elodie Quach a fondé la plateforme de mise en relation entre apprentis et particuliers Youdy.

À l’occasion du premier anniversaire de mise en œuvre de la plateforme qui met en relation apprentis et particuliers, sa fondatrice Élodie Quach revient sur sa propre reconversion professionnelle. Un parcours atypique qui l'a fait passer d'ingénieure à entrepreneuse. Avec la même ambition, celle de se rendre utile pour les autres.  

Il y a une quinzaine d'années, l’étudiante Élodie Quach fréquentait les écoles de coiffure pour se faire couper les cheveux à moindres frais. Un « bon plan » tarifé 4 ou 5 euros qui se transmettait – et se transmet encore – par le bouche-à-oreille. De quoi permettre aux jeunes, comme aux moins jeunes, de s’offrir un service de qualité et aux futurs professionnels de s’entraîner sur de vraies têtes à coiffer. Aujourd’hui, la trentenaire n’a, d'un strict point de vue financier, plus besoin de se rendre dans ces établissements. Mais elle n’a rien oublié du passé et entend bien en faire profiter le plus grand nombre. C’est ainsi qu’est née la plateforme « Youdy » dont l’intérêt repose précisément sur la mise en relation entre des clients soucieux de leurs dépenses et des apprentis désireux de se parfaire.

Miser sur le donnant-donnant 

En 2018, Élodie Quach travaillait déjà depuis plusieurs années chez Carrefour en tant qu'ingénieure agroalimentaire quand elle se met en tête de se former à nouveau. Et la voilà apprentie cuisinière, histoire de nourrir une passion ancienne pour la bonne chère. Mais dans ce type d'études, on délaisse les exercices de mathématiques pour mieux mijoter des plats plus ou moins caloriques. Or la néo-apprenante se trouve vite confrontée à deux problèmes : le coût des matières premières et le besoin de recueillir un avis sincère sur ses créations. Pas évident, car sa « formation étant dispensée sur internet », l’entraînement se pratique à la maison. Du coup, elle sollicite famille et amis : « Je leur demandais de goûter mes plats, puis rapidement je me suis rendu compte que ce n’était pas facile d’avoir un retour objectif... À vrai dire, je n'en ai jamais eu », plaisante aujourd’hui la jeune femme. Parmi ses collègues, certaines s’essayent au CAP Pâtisserie, en se confrontant aux mêmes difficultés : la solitude dans l’exercice et le coût financier de la pratique. C’est comme ça qu’Élodie élabore une formule qui aurait pu permettre de proposer ses créations culinaires à ses voisins, contre une participation à ses frais. L’envie est là, mais le diplôme à présent en poche, l’idée reste au fond d’un tiroir. L’ingénieure reprend son bout de chemin à Carrefour.

Permettre à chacun de « bien vivre » 

Puis vient le temps des confinements et l’opportunité de quitter le groupe. En mars 2022, c’est décidé, la jeune femme saute le pas. Après onze ans à travailler pour la grande distribution, Élodie profite d’un plan de départ volontaire pour démarrer son projet. « Ça faisait plus de deux ans que j’y pensais, et personne n’avait encore lancé l’idée, j’ai pris cela pour un signe… » précise la créatrice de la plateforme Youdy. Avec son service internet, elle crée une passerelle entre des apprenants et des clients. Le nom, trouvé par sa mère, rend hommage à ses origines laotiennes et signifie « bien vivre ». C’est aussi une contraction entre deux mots anglais, « You » (vous) et « Study » (étudier). 

Et les recrutements sont « étudiés » méticuleusement. À chaque nouvelle arrivée, Élodie répète le même schéma d’intégration des apprenants : après avoir rempli un formulaire en ligne, l’apprenti passe un entretien avec la fondatrice, avant une phase de pratique. « J’ai longtemps travaillé en qualité, et je fais particulièrement attention aux règles d’hygiène, mais aussi à la manière dont les apprenants reçoivent les clients ». Après quoi, le binôme s’accorde sur les disponibilités pour les rendez-vous et les tarifs des prestations, eux-mêmes basés sur la participation de tout ou partie des frais de l'apprenant nécessaire à sa pratique.

Deux règles demeurent immuables pour participer au projet : résider en Île-de-France et être inscrit dans un centre de formation. À ce jour, la plateforme compte 28 apprenants ayant réalisé plus de 500 prestations.  « Je commence à sonder nos clients pour apprécier leur retour. Certains viennent par curiosité, d’autres sont attirés par les tarifs moins chers. Beaucoup aiment cette idée d’entraide locale », se réjouit Élodie.   

Une reconversion en quête de sens 

À 35 ans, Élodie Quach aura bientôt trois diplômes à son actif : à celui d’ingénieure agronome s’ajoutent un CAP cuisine et sous peu un mastère spécialisé en entrepreneuriat. Si elle ne désire pas forcément cumuler les titres, cette passionnée aborde chacune étape de sa vie avec la même intensité, et un même objectif en tête : être utile aux autres.  

Fille de commerçant, la native de Saint-Denis (93) a grandi en aidant son père au magasin, d'abord restaurateur puis fleuriste. Pour ses parents, elle se devait de faire carrière. Cette ambition l'a portée sur les bancs des grandes écoles, puis dans les bureaux d'un groupe mondial, avant de revenir, comme ses parents, à l'entrepreneuriat. Avec Youdy, Élodie ne prétend pas offrir un salaire aux apprentis, mais plutôt une opportunité de réduire leurs dépenses tout en gagnant en expérience. Il s’agit aussi de proposer des services parfois coûteux, à l’image des massages ou de la grande cuisine, à bas prix. Avec ce retour aux sources, elle désire revaloriser les métiers de l’artisanat et les faire aimer de tous les publics. Si l’amour dure trois ans pour certains, c’est aussi le temps qu’elle se laisse pour réussir ce pari passionnel.  

 

Perrine Basset © CIDJ
Article mis à jour le 21-02-2023 / créé le 16-02-2023