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Avec le Digital Services Act, l’UE joue à la police du web

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Sur Twitch, le cyberharcèlement est régulier envers les influenceurs, surtout les femmes.

Avec l’instauration du Digital Services Act, l’Union européenne s’attaque à la régulation des géants du web, avec en ligne de mire les propos haineux. Mais certains passent pour l’instant entre les mailles du filet, comme la plateforme Twitch, qui a été le théâtre d’une vague de cyberharcèlement lors du GP Explorer, samedi dernier.

Ils étaient plus d’un million de viewers sur Twitch pour cette seconde édition du GP Explorer, organisé par le youtubeur Squeezie. Un événement de F4 démentiel, qui a réuni près de 60 000 personnes au Mans (72) mais qui, en ligne, n’a pas échappé aux règles du net : l'influenceuse Manon Lanza, à l’origine d’un accident entre sa voiture et celle d’un autre influenceur, a vu déferler sur elle une vague de haine et de sexisme. Car la loi sur les réseaux sociaux, c’est… qu’il n’y en a pas. Si la majorité des plateformes (TikTok, Snapchat, Instagram…) doivent désormais se conformer aux normes du Digital Services Act (DSA), mis en place le 25 août dernier, Twitch échappe quant à elle aux contrôles de l’Union européenne. Pour l'instant.

En ligne, l’UE souhaite mener la danse

Dans la famille des sigles, je voudrais… le frère ! Après le RGPD, le Règlement général sur la protection des données instauré en 2018, l’Union européenne met en place le DSA, le Digital Services Act. Derrière ce nom un peu barbare se cache en réalité une nouvelle réglementation, adoptée en 2022 et effective en août dernier, qui vise à réguler les contenus illicites qui se trouvent sur Internet. Par « illicites », l’instance comprend notamment les contenus de haine en ligne, le cyberharcèlement, les fake news, les images pédopornographiques… Il était temps ! Le DSA vient remplacer une directive sur le commerce électronique, qui date quant à elle de… 2000.

Le mot d’ordre est : ce qui est illégal hors ligne est illégal en ligne. Et ce, dans toute l’Union européenne. Car l’objectif premier est d’harmoniser les règlements au sein du marché intérieur, et de lutter ensemble face aux risques en ligne. Il est question entre autres de « mieux protéger les internautes européens et leurs droits fondamentaux (liberté d'expression, protection des consommateurs...) ; aider les petites entreprises de l'UE à se développer ; renforcer le contrôle démocratique et la surveillance des très grandes plateformes et atténuer leurs risques systémiques (manipulation de l'information...) », selon le site Vie Publique.

Les GAFAM dans le viseur de l’Europe

Amazon Store, Booking.com, Facebook, Google Maps, Instagram, TikTok, X (anciennement Twitter), YouTube… Les 17 plateformes concernées par la première phase du DSA sont des réseaux sociaux, market places, plateformes d’hébergement et de voyage ou encore des moteurs de recherches. Leur point commun est de compter “plus de 45 millions d’utilisateurs actifs dans l’UE”.

La seconde phase, qui sera admise le 17 février 2024, concernera tous les autres sites internet, comme Twitch. En fonction de la nature des services proposés et de la taille des plateformes, les acteurs du numérique ne seront pas soumis aux mêmes règles mais tous devront, s’ils sont établis hors UE, « désigner un point de contact unique ou un représentant légal et coopérer avec les autorités nationales en cas d'injonction ».

De manière générale, les plateformes devront respecter trois usages : la lutte contre les contenus illicites (avec la mise en place d’un outil permettant aux internautes de signaler facilement les contenus illicites), la transparence en ligne (en interdisant la publicité ciblée pour les mineurs, ainsi que la publicité basée sur des données sensibles comme les opinions politiques, la religion ou l’orientation sexuelle (sauf consentement explicite)), et enfin l’atténuation des risques et réponse aux crises (en effectuant tous les ans des audits indépendants de réduction des risques, sous le contrôle de la Commission européenne).

Après les grands discours, place aux Act

Les textes devront entrer en vigueur le 17 février prochain, bien que les 17 plateformes nommées soient déjà concernées par ces nouvelles restrictions. Pour les contrôler, des « coordinateurs de services numériques » ont été désignés dans chaque état membre. En France, c’est l’Arcom qui sera chargé de cette tâche. Ensuite, les 27 coordinateurs veilleront ensemble au respect de cette nouvelle loi. Le DSA prévoit, en cas de violations graves de son règlement, d’interdire les activités des plateformes sur le marché européen. Des sentences qui en ont effrayé plus d’un : le groupe Amazon et le site Zalando ont déjà contesté leur place dans la liste des 17 « grands groupes »…

Perrine Basset Fériot © CIDJ
Actu mise à jour le 22-09-2023 / créée le 22-09-2023

Crédit photo : Photo de Szabo Viktor sur Unsplash