• actualité

Football : un Français sur deux boycottera la Coupe du Monde 2022

  • Voyager dans le monde
  • Vacances - Loisirs - Bons plans
Football : un Français sur deux boycottera la Coupe du Monde 2022

La Coupe du Monde de Football 2022, qui se tiendra cet automne au Qatar, sera inédite à plus d’un titre. Entre aberrations écologiques, drames humains et soupçons de corruption, il n’en faut pas plus pour pousser une partie du public à boycotter l’évènement planétaire. Et selon un récent sondage, cela concernera près de la moitié des Français. Et vous, vous serez devant votre poste ?

Quelque 17 000 adultes, provenant de plusieurs continents, ont été sollicités par l’ONG Amnesty International pour répondre à une poignée de questions, liées à la tenue très polémique de la Coupe du Monde 2022 au Qatar. Notamment interrogés sur la probabilité qu’ils regardent au moins un match de cet évènement planétaire, les sondés ne sont pas unanimes. Dans le camp du boycott, on retrouve ainsi les Américains (63 %), les Finlandais (51 %), les Français (48 %) et les Norvégiens (47 %). À l’inverse, pas question de bouder les épreuves sportives, retransmises à partir du 20 novembre 2022 et pour une durée de 36 jours, pour les Kenyans (90 %), les Argentins (80 %), les Marocains (69 %), les Espagnols (61 %), les Suisses (58 %), les Hollandais (53 %) et les Danois (48 %). En définitive, seuls les Allemands font match nul avec 46 % de pour et autant de contre.

Une Coupe du Monde 2022 au bilan écologique désastreux

Avant même de démarrer cet automne, la Coupe du Monde 2022 a fait beaucoup parler d’elle depuis son attribution en 2010 au Qatar, par la FIFA. Et les raisons de la colère sont nombreuses. Sur la question écologique d’abord. La tenue d’un tel évènement dans un pays chaud relève pour beaucoup de l’hérésie. Car, en hiver aussi, les températures atteignent les 30 degrés, ce qui contraint l’organisateur à construire des stades climatisés (7 sur les 8). De quoi faire réagir notre Première ministre, Élisabeth Borne. En matière de sobriété énergétique, « ce n’est pas un bon signal » a-t-elle euphémisé. Pire, sur les huit lieux de rencontres créés pour l’occasion, au moins un (le Ras Abou Aboud) sera intégralement démonté à l’issue des festivités. Pour le président du jury du Festival de Cannes 2022 s’en est trop. Vincent Lindon, qui appelle au boycott de l’évènement, a ainsi déclaré sur France Inter, fin août 2022 : « Sur le papier, [le pays] avait zéro chance de l’avoir : ni les spectateurs, ni les infrastructures, ni le climat… Et ils ont gagné contre les États-Unis […] C’est vous dire le nombre d’arrangements, de compromis ou de compromissions […] Je crois qu’aujourd’hui, on se laisse dévorer par l’argent rouge de sang ».

Une Coupe du Monde 2022 au bilan humain calamiteux

Au-delà de la question environnementale, bon nombre de détracteurs dénoncent les conditions de réalisation de cette Coupe du Monde. Des dizaines de milliers de travailleurs, venus d’Inde, du Pakistan, du Népal, du Bangladesh et du Sri Lanka ont turbiné pendant des années, sous une chaleur suffocante. D’après The Guardian, en compilant les différentes sources gouvernementales des pays d’origine des employés, en moyenne 12 ouvriers migrants sont décédés chaque semaine depuis décembre 2010. Au funeste bilan, incomplet selon le quotidien britannique, car il n’a pas été notamment possible de récupérer les données d’autres États pourvoyeurs de main-d’œuvre (Philippines, Kenya), on dénombrerait au moins 6 500 victimes à ce jour. Pour l’ancien attaquant Éric Cantona, cette Coupe restera celle de l’horreur : « Combien de milliers de morts, pour construire ces stades, pour au final amuser la galerie deux mois… Et tout le monde s’en fout… La caricature même de ce que l’homme est capable de porter en lui comme saloperie extrême ! »

Et les efforts du Qatar pour contenir les critiques ne suffisent pas pour calmer le camp des opposants. En effet, l’émirat a officiellement aboli la Kafala en 2016. Mais cette mise sous tutelle de n’importe quel travailleur étranger, l’empêchant de changer d’emploi ou de quitter le pays sans autorisation, serait encore d’actualité. De quoi pousser le Quotidien de la Réunion au boycott intégral. « Les journalistes […] affirment qu’ils ne donneront aucune information sur cette coupe du monde, même si la France gagne, même si un joueur réunionnais comme Dimitri Payet marque un but victorieux », rapporte Mayotte 1.

Une Coupe du Monde 2022 dans un pays aux mœurs différentes

Les soupçons de corruption liée à l’attribution de la Coupe du Monde au Qatar en 2010 par la FIFA conduisent le parquet national financier français à mener l’enquête. Tout comme les autorités suisses et américaines. En attendant leurs conclusions, certains détracteurs relèvent aussi la « profonde différence culturelle » du Qatar à même de doucher l’esprit de fête inhérent à ce type d’évènement. Ainsi, selon le Daily Star, il sera défendu de batifoler sur place. « Ceux qui [seraient] surpris en train de se livrer à des ébats avec quelqu’un d’autre que leur conjoint encourent une peine de sept ans de prison », rapporte le quotidien anglais en citant des sources policières. Et de rappeler que dans ce royaume, les relations extra-conjugales sont interdites, au même titre que l’homosexualité punissable de sept ans d’emprisonnement, voire à l’exécution pour les personnes de confession musulmane. Et pas question de profiter de l’évènement pour défendre une cause contraire aux mœurs locales. Cité par l’agence AP, le major général Abdulaziz Abdullah Al Ansari a ainsi spécifié que « si vous souhaitez manifester votre point de vue concernant la cause LGBT, faites-le dans une société où elle sera acceptée » avant d’ajouter que « si un fan brandit un drapeau arc-en-ciel et qu’on [le] lui enlève, ce n’est pas pour l’offenser, mais pour le protéger […] quelqu’un d’autre pourrait l’attaquer […] je ne peux pas garantir le comportement de tout le monde ». Autrement dit, il n’y a qu’à bien se tenir et respecter les mœurs du royaume. Et, dans une interview-fleuve accordée à l’hebdomadaire Le Point, l’Émir du Qatar met les points sur les I. Interrogé sur la place des femmes dans son pays, connu pour être patriarcal, le Cheikh Tamim ben Hamad Al Thani, précise que « devant Dieu, nous sommes tous égaux, hommes ou femmes », même si « nous sommes conscients qu’elles sont victimes de discrimination dans le monde »… Comprenez : en dehors du Qatar. Dont acte même si la lecture d’une série de témoignages de jeunes qataries collectés par Human Right Watch pourra utilement compléter son interview. Dans ce document de 2021, intitulé « Tout ce que je fais nécessite l’accord d’un homme », on y découvre notamment que « les règles du gouvernement qatari interdisent aux femmes qataries de moins de 25 ans de voyager à l’extérieur du pays sans la permission de leur tuteur masculin : généralement, leur père, leur frère, leur oncle ou leur grand-père. Une femme mariée peut voyager à l’étranger sans la permission de son mari, mais son mari peut demander à un tribunal d’interdire son voyage. » Pas sûr que tout le monde goûte à ces subtilités culturelles… En attendant, sur les réseaux sociaux, les boycotteurs font valoir leurs arguments sous le hashtag #BoycottQatar2022. Et c’est souvent instructif.

La rédaction © CIDJ
Actu mise à jour le 19/09/2022 / créée le 19-09-2022

Crédit photo : Hasan Zaidi - iStock