Pourquoi le Canada attire autant les étudiants français ?

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Le Canada reste la destination préférée des jeunes français pour leurs études.

Avec plus de 17 500 Français qui y étudient, le Canada se hisse en tête des destinations privilégiées par les jeunes pour leurs études. Prestige des établissements, sécurité linguistique, dépaysement, le pays à la feuille d'érable ne manque pas d'arguments pour séduire des jeunes en quête d'évasion. Témoignages. 

« Inconsciemment, je cherchais un peu d’air et le Canada semblait pouvoir m’en donner », confie Agathe. Cette Française de 34 ans, désormais installée au Québec, a pris la décision de franchir l’océan pour ses études en 2014. Avant, elle travaillait en qualité de juriste en droit de l’urbanisme au sein d’un cabinet d’avocat à Paris.

« J’étais dans un milieu qui exigeait de s’échiner 24 heures sur 24. De plus, j’avais l’impression, en tant que fille, d’être freinée dans mes possibilités d’avancement . Évidemment, ce n’était pas dit comme tel. Mais, lorsque je regardais autour de moi, j’étais bien obligée de constater que la quasi-totalité des associés du cabinet était des hommes », témoigne cette Québécoise d’adoption.

Première destination des étudiants français

Alors âgée de 24 ans, elle décide de démissionner de ce travail qu’elle perçoit comme harassant, met de l’argent de côté pendant un an, car des ressources financières il en faut pour ce grand voyage, avant de poser ses bagages à Montréal. Elle s’inscrit en maîtrise — équivalent en France d’un Master — dans le domaine de l’urbanisme.

Chaque année, nombreux sont ces jeunes qui, comme Agathe, survolent l’océan pour suivre une scolarité au Canada.  D’après une enquête de Campus France publiée en juin 2022, 17 523 Français étudiaient, en 2019, au sein d’établissements canadiens. Ces chiffres font du pays à la feuille d’érable, la première destination prisée par les Français pour leurs études, devant la Belgique (2e) et le Royaume-Uni (3e). 

Pour son confort linguistique, la seule province parmi les dix que compte le Canada à avoir pour langue officielle le français, attire toujours plus de candidats à l’exil. À l’Université du Québec à Montréal (UQAM), les Français représentent ainsi 41 % du total des étudiants internationaux (avec 2025 jeunes hexagonaux en 2022). À l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), ce taux grimpe à 55 % (avec 1150 élèves français). 

Des classements internationaux qui séduisent 

Ces chiffres s’expliquent en partie par une politique tarifaire attractive, en raison d’accords gouvernementaux, offerte aux jeunes Français par les universités québécoises. Ces derniers règlent des frais de scolarité similaires, pour un baccalauréat (équivalent de la licence en France) au Québec, à ceux des étudiants canadiens (exception faite des Québécois bénéficiant de tarifs encore plus avantageux). Pour la maîtrise, les Français ainsi que les Belges voient leurs frais de scolarité alignés sur ceux des Québécois. À l’UQAM par exemple, en première année de maîtrise (sans mémoire), un Français paiera 3 000 dollars canadiens (2046€).

Certains établissements de la Belle Province jouissent d’un réel rayonnement à l’international. « Le positionnement des universités québécoises dans les classements internationaux joue aussi sa part dans le choix des jeunes Français de rejoindre le Québec pour leurs études », explique Sandra Jaqueson, conseillère au service de l’admission et du recrutement de l’Université de Montréal (UdeM). Selon le classement du Times Higher Education (THE) 2024, qui porte sur plus de 1600 universités dans le monde, la célèbre université montréalaise McGill se place au 49ème rang tandis que l’Université de Montréal occupe le 111ème.

« Le classement international de l’UdeM comptait beaucoup dans le choix de mon lieu d’étude », raconte Clara, Française de 25 ans vivant à Montréal depuis 2018. Originaire de Toulouse, la jeune femme, qui se décrit comme ayant « toujours eu la bougeotte », commence à mûrir l’idée d’un départ au Canada alors qu’elle a 18 ans, à la suite d’un salon sur le sujet. Sur le moment, elle ne dispose pas des fonds suffisants pour partir. Un voyage aux Amériques, cela se prépare à l’avance ! Elle ne souhaite pas non plus demander à ses parents de financer un tel déplacement. La jeune femme conservera tout de même l’idée dans un coin de sa tête.

« Ici, tout est une question de confiance, de persuasion et de motivation »

Baccalauréat en poche, elle poursuit à Nantes, en licence de Langues étrangères appliquées (LEA). Puis, elle s’envole par le biais du dispositif Erasmus, pour sa troisième année, en Colombie, dans un cursus de Relations internationales. Là-bas, elle croise la route d’un jeune qui est en processus de demande de résidence permanente au Québec. L’idée de continuer ses études en terres canadiennes resurgit. À son retour en France, après l’obtention de sa licence, l’étudiante se décide enfin à économiser pour préparer son voyage. « J’ai travaillé pendant un an comme serveuse : au total j’ai pu mettre 6000 euros de côté », se remémore la Toulousaine. 

Lorsqu’elle pose le pied sur le territoire québécois, la jeune femme passe par une année de vérification de ses connaissances et compétences, avant d’intégrer l’université qu’elle désire. Elle est admise en 2019 dans une maîtrise en Études internationales à l’UdeM dont elle sort diplômée en 2021. Quelques mois plus tard, en janvier 2022, alors âgée de 24 ans, elle est embauchée au poste de directrice générale d’une fondation. Une ascension éclair qui, selon la Toulousaine, aurait sans doute pris beaucoup plus de temps en France, raison pour laquelle elle souhaite s’établir plus durablement au Canada. « Ici, tout est une question de confiance, de persuasion et de motivation. On peut se voir confier des responsabilités très vite, même lorsqu’on est jeune », explique Clara. 

Tout n’est pas rose au pays de la fleur d’érable

Sa maîtrise d’urbanisme en poche, Agathe non plus n’a pas tardé à trouver un emploi : en trois semaines elle est embauchée dans son domaine, toujours en tant que juriste. « Sur le plan professionnel, je me sens beaucoup plus valorisée au Québec par rapport à mes compétences. J’ai plus de liberté, ma parole est mieux considérée : quand je parle, on m’écoute », explique la Française, aujourd’hui établie de l’autre côté de l’Atlantique depuis plus de huit ans. 

Pour autant, tout déplacement à l’international doit demeurer une décision savamment soupesée. L’éloignement des proches, la rudesse du climat six mois par an et le coût de la vie peuvent constituer autant de facteurs de désillusion une fois sur place. Les images d’Épinal, notamment sur l’hospitalité des locaux, sont légion. « En France, on perçoit souvent les Québécois comme un amas de personnes très agréables et accueillantes. Maintenant que j’y suis, je reconnais que ma vision a changé. Le Québec, à l’instar de l’Amérique du Nord, reste une société très individualiste. Je trouve parfois la mentalité un peu froide et distante », observe Clara. Pour elle, il y aurait autant d’étudiants français déçus du Canada repartant en France que de jeunes satisfaits qui s’y installent durablement. En tout état de cause, cette expérience outre-Atlantique pourra à coup sûr être valorisée sur un CV et susciter d’autant la curiosité de recruteurs potentiels.

 

Basile, nous raconte son expérience de mobilité

Passionné par le monde artistique et acrobatique, Basile Hermann Philippe a 18 ans, et son bac en poche, lorsqu'il décide de passer des auditions pour intégrer une école de cirque. Après différents essais, il décroche une place pour rejoindre la célèbre École nationale de cirque de Montréal. Parti pour trois ans d'études, Basile vit son expérience à fond et finira par rester près de sept ans au Québec. En savoir plus

 

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Florian Mestres © CIDJ
Article mis à jour le 25-01-2024 / créé le 05-12-2022