Microlycée : reprendre ses études après un décrochage

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Repasser le bac en microlycée après un décrochage

Trouver un emploi stable quand on est jeune n’est pas toujours facile. Sans diplôme, ça l’est encore moins. Les microlycées sont des structures publiques et expérimentales qui proposent aux élèves qui ont totalement arrêté l’école, pendant quelques mois ou plusieurs années, de décrocher le bac pour reprendre le chemin des études.

Environ 1 jeune sur 8 quitte le système scolaire sans diplôme ou avec le seul brevet des collèges en poche. Pour leur permettre de se réinsérer dans un cadre scolaire, plus de 70 structures de retour à l’école (SRE), dont une trentaine de microlycées, existent en France. L’objectif est double : reprendre à la fois des études et de la confiance en soi.

Le microlycée, pour se réconcilier avec l’école

« Un dragon ». À Limoges, au micro-lycée Utrillo, Carole Deloustal, enseignante et coordinatrice nous confie avoir « un dragon » collé sur sa porte. « C’est à cause de la première promo… Finalement, cette image me plaît bien, explique-t-elle, amusée. Un dragon c’est à la fois une créature imaginaire qui fait peur en crachant du feu, mais c’est aussi une figure de protection qui prend sous son aile les plus fragiles. » Pour elle, cela résume bien la philosophie du microlycée : un subtil équilibre entre exigence et bienveillance. « Si on n’est qu’exigence, on est maltraitant. Si on n’est que bienveillance, on est laxiste. Et dans les 2 cas, on n’aide pas l’élève à avancer », tranche-t-elle. Or, l’objectif d’un microlycée c’est bien d’avancer à l’école, en permettant à ses recrues de préparer un bac général ou technologique -plus rarement professionnel- après un décrochage.

Élèves en échec ou décrocheurs, jeunes parents, profils atypiques (dyslexiques, autistes, hyperactifs avec troubles de l’attention…) ou avec des troubles psychiatriques : les microlycées accueillent les 16-25 ans que l’école ordinaire a perdu de vue. Seules conditions : s’y inscrire de sa propre initiative et avoir un niveau minimum de fin de 3e. Certains viennent d’une filière professionnelle inachevée. D’autres sont déjà passés par une seconde, une première ou une terminale, mais souvent pour quelques mois seulement. Tous, en tout cas, ont choisi d’être là.

Préparer le bac, tel est l’objectif du microlycée

À l’image de Benan, ancien élève au microlycée de Sénart, qui a mené un parcours scolaire plutôt classique dans un établissement ordinaire avant que tout bascule en 1re. « À mon premier devoir sur table en SVT, j’ai eu 3/20. Un choc. Je n’avais jamais eu cette note de ma vie ». Puis, c’est la dégringolade. « En cours, je m’ennuyais, les relations avec les profs devenaient compliquées. J’étais catalogué comme le cancre, le mauvais élève. Pourtant, je travaillais parfois jusqu’à tard le soir, mais ça ne fonctionnait pas. Ça s’est soldé par un échec au bac, mais je ne pouvais pas redoubler dans mon lycée » rembobine-t-il. À la rentrée suivante, Benan entend parler du microlycée, qui par chance, se trouve dans la ville d’à côté.

Là-bas, il rejoint une promo d’une dizaine d’élèves qui partage un objectif commun : décrocher le bac. L’enseignement se fait en petit groupe, les professeurs sont donc plus disponibles. Ce qui rend au jeune homme le goût d'apprendre : « on nous encourageait à participer et à poser des questions. J’ai appris à me réintéresser aux mathématiques et j’ai découvert la sociologie que j’ai adorée ». Pour Benan, l’espace scolaire devient aussi un espace d’accomplissement de soi. « J’ai l’impression que ce que j’y ai appris a façonné ma personnalité et même mes goûts d’adultes », analyse-t-il aujourd’hui. Quelques mois plus tard, il repasse le bac et le décroche, cette fois, avec une mention. Il tente un bref passage en licence universitaire avant finalement d’intégrer un BTS commerce en alternance suivi d’un master en achat international et logistique dans une école de commerce. « J’avais l’impression d’avoir déraillé, le micro-lycée m’a remis sur les rails », résume-t-il. Au départ, ce n’était pourtant pas gagné, le jeune homme avait peur de « perdre son temps » et « de ne pas réussir à rebondir après un premier échec ».

Apprendre autrement en microlycée en faisant retomber la pression de l’évaluation

« Ce qui m’a tout de suite étonné en arrivant, c’est le rapport entre élèves et professeurs. On est considéré comme des adultes. » pointe Benan. En microlycée, la moyenne d’âge tourne généralement autour de 20 ans. « Il n’y a pas de salle des profs, enseignants et élèves partagent les mêmes espaces. Chaque élève est suivi par un enseignant référent. On donne la priorité à la discussion et au dialogue. Les règlements intérieurs sont aussi plus souples. » précise Olivier Haeri, enseignant au microlycée de Sénart et délégué général de la Fespi, association qui regroupe les établissements innovants de France. Progressivement, le lien entre élèves et école se retisse. Des dispositifs spécifiques sont souvent mis en place comme des ateliers de pratique culturelle et sportive, des accompagnements sur la méthode de travail, du co-enseignement ou des périodes de révision.

A côté, le programme, assuré par des professeurs de l’éducation nationale, reste le même que dans un lycée ordinaire. « On les prépare aux mêmes épreuves, mais on essaie de dédramatiser la notation », nuance Rosy Loques, coordinatrice au microlycée Benjamin Franklin d'Orléans. En effet, en microlycée, l’évaluation des élèves n’est pas nécessairement notée et quand elle l’est, tout est mis en place pour faire retomber la pression. « Par exemple, on donne la possibilité aux élèves de refaire un devoir, même accompagné ou avec le livre à côté, car on est persuadé que c’est ainsi qu’ils pourront progresser », ajoute Carole Deloustal. Faire progresser les élèves et les réintégrer progressivement dans un système qui les a laissés sur le bord de la route ou qu’ils ont rejeté, telle est l’ambition des microlycées. Et souvent, ça fonctionne. Olivier Haeri rappelle qu’il y a toujours « un écart, de 10 à 25 % selon les structures, entre le nombre de jeunes inscrits en septembre et ceux qui passeront le bac en fin d’année, mais le taux de réussite des élèves présents à l’examen est semblable à celui des autres lycées ». Autrement dit, ces micro-lycées obtiennent de maxi résultats. Pari tenu.

Lycées de la nouvelle chance, expérimentaux, innovants, microlycées... Où s'inscrire après un décrochage ? En tout, on compte un peu plus de 70 structures de retour à l’école (SRE) en France. Un chiffre qui ne cesse d’évoluer : à chaque nouvelle rentrée scolaire, environ 5 à 10 nouvelles structures s’ouvriraient sur l’ensemble du territoire, y compris en Outre-mer. Leur point commun est d’accueillir, en petit groupe, des jeunes qui ont connu une période de rupture et qui ont le désir de revenir à l’école pour préparer un diplôme. Certaines n’accueillent que des jeunes en terminale, d’autres proposent un enseignement dès la classe de seconde ou de première. Lorsqu’ils ont des partenariats avec des lycées professionnels, certains établissements préparent au bac pro, mais c’est plus rare. L’immense majorité prépare à des bacs technologiques ou généraux, le plus souvent à dominante économique ou littéraire, mais là encore cela dépend des professeurs qui y enseignent. Pour consulter la liste des structures de retour à l'école, cliquez ici.

carte des structures de retour à l'école

Carte des structures de retour à l'école en France © Data.education.gouv.fr

 

Laura El Feky © CIDJ
Article mis à jour le 11-10-2022 / créé le 03-10-2022