• Reportage

Le Pôle Innovant Lycéen : le lycée pour raccrocher avec la scolarité

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Le Pôle Innovant Lycéen, le seul établissement dédié au retour scolaire

Créé il y a 20 ans, le Pôle Innovant Lycéen accueille gratuitement les jeunes de plus de 16 ans en décrochage scolaire pour leur proposer des parcours de réinsertion. Dans un cadre privilégié d’accompagnement personnel, les élèves profitent de cette année pour construire leur futur et reprendre le chemin de l'école.

Niché au rez-de-chaussée des bâtiments du 16 bis avenue Marc Sangnier, dans le 14e arrondissement parisien, le Pôle innovant lycéen (PIL) reste un ovni du système scolaire. D'extérieur, la bâtisse ne paye pas de mine. Mais à l'intérieur, ce sont pourtant des locaux refaits à neuf qui reçoivent les étudiants. Passé le sas de réception, un hall coloré accueille les jeunes élèves. Comme dans n’importe quel autre établissement, on retrouve le décor classique : emplois du temps affichés au mur, bouquins et revues dans le coin « CDI », noms des futurs participants au « club lecture » inscrits sur le tableau blanc…

Pourtant, quelques détails le distinguent : un espace cafétéria ouvert à tous, adultes comme étudiants, un photomaton créatif, et même… une salle des profs entièrement vitrée. Ici, aucune frontière ne sépare les encadrants des élèves. Le lieu de réunion donne directement sur l'agora « pour que les jeunes puissent facilement nous interpeller », précise Stéphane Lansard, professeur d’EPS au PIL. Et cette proximité attire des adolescents de tous horizons. Quatre d’entre eux livrent, à notre micro, leurs motivations pour « raccrocher » après des errements de différente nature.

Un retour à l’école pas à pas

Pour intégrer le PIL, un entretien de motivation est nécessaire. Le plus souvent, les jeunes assistent à une réunion d’information organisée par le corps enseignant en amont. À cette issue, ils peuvent se rapprocher des encadrants et envisager leur venue dans l’établissement. Les critères d’admission sont simples : le candidat doit avoir au moins 16 ans, être décrocheur ou ne pas avoir fréquenté un établissement scolaire sur les six derniers mois. Et surtout, il doit être enthousiaste et décidé pour suivre les enseignements du PIL. Lors de son entretien de motivation, l’élève doit choisir une ou deux des cinq filières proposées, en cohérence avec ses futures envies de « raccrochage ».

« En moyenne, on prend environ 3 jeunes sur 4, analyse Stéphane Lansard. Si un jeune remplit les critères et se montre vraiment volontaire, il y aura toujours de la place pour lui ». Ensuite, plusieurs dates de rentrée sont offertes, échelonnées entre septembre et décembre. Pour les élèves qui arriveraient en cours de route, passé le mois de janvier, une passerelle demeure possible : appelée le Lien, cette classe spéciale permet aux étudiants de suivre une préparation de 3 demi-journées par semaine jusqu’au mois de juin. Ils intégreront par la suite un des cinq programmes à la rentrée suivante, ou se dirigeront vers une autre voix.

Cinq parcours de réussite

Français, Mathématiques, mais aussi Culture générale ou Énergies renouvelables… À la différence des microlycées, le PIL ne délivre pas de formation diplômante. Les cours, qui sont basés sur les programmes de 3e et 2de, visent principalement à mener à bien le projet de réinsertion dans le milieu scolaire ou professionnel. Les cinq programmes (Classes des Futurs, Classe Culture Langue Arts et Sports, Classe du Lycée Inversé, Classe Solidarité Internationale, Classe au Long Cours) permettent aux élèves de se tourner vers les thématiques qui leur plaisent le plus, comme les arts ou l'engagement humanitaire, et de créer leur propre projet. La Classe Solidarité Internationale est partie en janvier dernier au Cambodge.

« Au PIL, la réussite ne se mesure pas aux résultats scolaires, bien au contraire. La seule réussite évaluée est celle du projet personnel », explique le professeur. Ainsi, un jeune peut se féliciter d’avoir réussi son cursus si ce dernier se retrouve l’année d’après dans le parcours d’orientation choisi, que cela soit dans le système scolaire, en formation, en service civique ou même dans la vie active. « Et même si l’élève ne se réinsère pas et reste en rupture, cela restera une réussite, car cette fois-ci, il l’aura choisie et non subie ».

Élèves et profs, tous volontaires

Un des principaux traits de caractère du PIL se retrouve dans les relations professeurs-élèves. « On dit souvent que les élèves doivent être volontaires pour rejoindre le PIL, mais c’est aussi le cas des enseignants ! », insiste Stéphane Lansard. Issus de l’Éducation nationale comme leurs collègues du général, les professeurs du PIL ont un quotidien pourtant bien différent : ils sont tous les jours présents sur le campus, ont le rôle de « référent » auprès de certains élèves et les accompagnent à chaque étape de leurs parcours personnels.

« Hormis le ménage et la cantine, on fait tout le reste », plaisante le professeur d’EPS. Un engagement qui leur permet de devenir un interlocuteur privilégié auprès des jeunes, et aussi des parents. « On ne fait pas de conseil de classe, mais des conseils de progrès, avant chaque période de vacances. On aide les élèves à faire leur propre bilan, et on invite les parents à participer afin qu’ils se rendent compte des avancées ». Le corps enseignant a fait le choix de ne pas sanctionner l’absentéisme des élèves : plutôt que de pénaliser le jeune, l’objectif est de comprendre l’origine de cette dernière. Dans ce microcosme parisien, les étudiants du PIL évoluent dans un univers « apaisé », selon les mots de leur responsable. Ici, il n’est pas question de se moquer, et la tolérance demeure la règle d’or.

Perrine Basset © CIDJ
Article mis à jour le 27-04-2023 / créé le 14-04-2023