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Economie circulaire : quels métiers pour demain ?

  • Environnement & Développement durable
Qu'est-ce que l'économie circulaire ?

Fabriquer, consommer et jeter… Ce modèle économique ne peut plus durer. Pour sauver la planète, notre façon de produire et de consommer doit changer pour devenir plus durable. C’est ce qu’on appelle l’économie circulaire. Tous les secteurs sont impactés et donc tous les métiers. Qui est concerné ? Comment ? Pourquoi ? Tour d’horizon de cette nouvelle économie qui va bouleverser notre vie et nos métiers.

2020 : Vincent a décidé de louer un appartement dans un immeuble collectif éco-responsable où la cuisine, la salle à manger et la terrasse sont communes. Julie, quant à elle, a renoncé à acheter une voiture car son immeuble participe au programme « Parkings intelligents » qui lui permet de louer la voiture d’un de ses voisins seulement quand elle en a besoin. Jasmine ne va plus dans un supermarché  depuis qu’elle a un magasin de vrac à deux pas de chez elle. Elle amène ses contenants et n’achète que ce dont elle a besoin. Fini les emballages et les poubelles qui débordent….

Sortir de l’économie du gâchis

Ce mode de vie de demain a été imaginé en 2015 par des étudiants de l’IPAG business school pour la Fondation Nicolas Hulot. Mais demain c’est déjà maintenant ! Tous ces services imaginés il y a deux ans existent. Notre économie va certainement changer de modèle. Le cycle : fabriquer, posséder, jeter pour à nouveau acheter va devoir cesser au profit d'une façon de consommer plus raisonnable : acheter des produits éco-conçus mais aussi louer, échanger, partager, réparer et en bout de course recycler.
C’est ce qu’on appelle l’économie circulaire et elle touche tous les secteurs d’activité. Comme le dit Nicolas Hulot, ministre de la transition écologique et solidaire lors des assises de l’économie circulaire en juin 2017 « l’économie circulaire est le seul modèle qui va nous permettre de sortir de cette civilisation du gâchis ».

Le déchet ne doit plus polluer mais devenir une nouvelle ressource. « L’économie circulaire est un changement profond de notre façon de produire et de consommer. Contrairement aux idées reçues, la gestion des déchets et le recyclage n’en constitue qu’une petite partie », explique Alain Geldron expert national matière première à l’Ademe.

L'Ademe a défini 3 grands secteurs et 7 piliers de l'économie circulaire dont vous trouverez le schéma ci-dessous.

Les 7 piliers de l'économie circulaire 

 

Ne vous lancez pas dans la première formation venue

Du CAP au bac +5, les métiers de l’économie circulaire touchent une grande variété de domaines et de compétences. Mais pour le moment, assez peu de nouveaux métiers émergent. En revanche, on assiste à une évolution des métiers existants. « L’économie circulaire est une façon de penser, pas une technique précise à apprendre », confie Nathalie Tessier Cheffe du bureau des métiers de la transition écologique au ministère de la transition écologique et solidaire.

L'économie circulaire c’est par exemple concevoir autrement l’organisation du travail, imaginer un produit en tenant compte de son impact environnemental durant toute sa durée de vie y compris sa fin. C’est aussi changer notre façon de consommer.

L'économie circulaire concerne quasiment tous les métiers ! « Si j’ai un conseil à donner, c’est de ne pas se précipiter sur toutes les formations qui portent le nom d’économie circulaire ou développement durable, ajoute Nathalie Tessier, les entreprises préfèrent recruter des personnes qui ont une solide formation technique avec éventuellement une dernière année de spécialisation. Trouvez d’abord un métier qui vous correspond ! Vous pourrez sûrement y apporter ensuite la touche économie circulaire ou développement durable qui vous tient à coeur ».

L’éco-conception est au cœur de l’économie circulaire.

Au niveau recherche et développement les ingénieurs, designers, concepteurs intéressés par le sujet devront se spécialiser en éco-conception. Leur travail est de concevoir un produit en le rendant le moins polluant possible à chaque étape de son cycle de vie. « L’éco-conception est au cœur de l’économie circulaire. Les produits doivent être pensés pour durer plus longtemps, être réparables et recyclables. Pour cela des spécialistes ayant une parfaite connaissance des propriétés techniques des matériaux vont être indispensables aux éco-concepteurs ainsi que les conseillers connaissant bien les techniques de recyclage existants actuellement » explique Laurence Mombet, ingénieur de formation en économie circulaire à l’AFPA. 

Ne plus acheter le produit mais l’usage qu’on en fait

On a tous acheté un objet inutile qui dort au fond du placard depuis des années. Une nouvelle façon de consommer commence à voir le jour appelée dans le jargon des spécialistes, l'économie de la fonctionnalité  : On n'achète plus un produit mais on loue ponctuellement son utilisation. De plus en plus de start-up se sont mises sur le créneau comme Tale me qui loue des vêtements écologiques pour enfants et femmes enceintes. « A plus grande échelle, une entreprise comme Michelin ne vend plus ses pneus aux sociétés de transport routiers mais les louent et ajustent ses tarifs en fonction du nombre de kilomètres parcourus. Il n’offre plus un produit mais un service. Une offre qui incite à ne plus commercialiser un maximum de pneus, mais au contraire à faire durer ceux déjà vendus » indique Alain Geldron. « Et à l’échelle du simple consommateur, d’ici 20 ou 30 ans, nous ne serons plus propriétaire de notre voiture », présage-t-il. Les entreprises vont donc revoir leur modèle économique. Des starts-up ont déjà pris le virage comme Koolicar qui propose de la location de voiture entre particulier.

Les métiers des services sont impactés

Si les métiers techniques ont une grande place dans l’économie circulaire, les métiers du marketing ou du commerce sont également impactés. De nouveaux types de commerce apparaissent comme les commerces de vracs. La vente de produits locaux et la mise en place de circuits courts se développent.  Les vendeurs devront être capables d’intégrer les notions d’économie circulaire à leur argumentaire de vente et les responsables marketing à leur communication. Du côté des banques et des assurances, les conseillers vont aussi devoir se former. « Dans la banque, les conseillers qui auront des demandes de prêts doivent avoir une bonne vision des marchés qu’il y a derrière pour prendre objectivement les décisions », renchérit Nathalie Tessier.

La réparation : un secteur pourvoyeur d’emplois

La réparation est le secteur le plus pourvoyeur d’emploi de l’économie circulaire. En 2013, on comptait 275 000 emplois. « Il y a un besoin grandissant de main d ‘œuvre dans ce secteur. La tendance est au ralentissement de la société du jetable. Pour allonger la durée de vie des objets, il faudra entretenir et réparer. La bonne nouvelle c’est que ces emplois ne sont pas délocalisables ! » se réjouit Nathalie Tessier. Mais attention, ces métiers de la maintenance vont devenir de plus en plus techniques car ils sont fortement impactés par les nouvelles technologies telles que l’imprimante 3D et les objets connectés.

Des nouveaux métiers dans la médiation et l’animation

« Les collectivités développent des actions dans l’économie circulaire. Elles commencent à recruter des animateurs ou chargé d’affaires « écologie industrielle et territoriale » de niveau bac+3 à bac+5. Les déchets d’une entreprise pouvant constituer des ressources pour une autre, cet animateur sera chargé d’instaurer et d’encourager les échanges entre acteurs économiques et industriels d’une région. Par exemple en Charentes Maritime, grâce à la création d’un réseau d’entreprises engagées dans l’économie circulaire, 3000 sacs de café en toile de jute ont été récupérés et transformés en toiture végétalisée », ajoute Alain Geldron. 

Le recyclage des déchets, un secteur phare de l’économie circulaire

Produire moins de déchets et recycler plus ! Voilà tout le challenge des prochaines années avec de forts objectifs de réduction des déchets d’ici 2025. D’après le ministère de la transition écologique : « le développement d’activités de réparation des produits usagés, de réutilisation ou de recyclage des déchets, génère de l’ordre de 25 fois plus d’emplois que la mise en décharge de ces déchets. » Aujourd’hui, le recyclage et la valorisation des déchets font travailler 110 000 personnes, 94% d'entre elles sont en CDI. 

« Dans le secteur du bâtiment qui produit énormément de déchets, des déchetteries professionnelles vont voir le jour ainsi que des ressourceries de matériaux. Les professionnels du BTP vont devoir se former pour apprendre à mieux trier en vue du recyclage », ajoute Laurence Mombet. Les épluchures et autres déchets végétaux devant disparaître de nos poubelles d’ici 2025, de nouveaux métiers comme maître composteur commencent à apparaitre. D’autres entreprises comme Phénix aide les supermarchés à réduire leurs déchets et éviter le gaspillage alimentaire. Cette start-up en pleine expansion recrute régulièrement des chargés de projet gaspillage alimentaire (voir encadré).

Et si vous inventiez votre propre emploi ?

Vous l’aurez compris, dans le domaine de l’économie circulaire les possibilités sont innombrables et tout reste encore à inventer. Vous avez des idées, envie de changer le monde et de donner du sens à votre emploi. Pourquoi ne pas tenter l’aventure ? Tale me ou Hylla penderie partagée se sont lancées dans la location de vêtements. Phenix et le frigo jaune luttent contre le gaspillage alimentaire. Lemontri installe des bacs de tri dans les entreprises, les campus et les gares, HOP lutte contre l’obsolescence programmée, les repairs café fleurissent, les ressourceries se développent, le mouvement zéro déchet prend son envol. Autant de jeunes entrepreneurs qui n'ont pas hésité à innover et devenir créateurs et inventeurs d’emploi. Alors pourquoi pas vous ?

3 questions à Nicolas Piffeteau, chargé de projet chez Phénix

Que fait Phenix ?

Phenix aide les supermarchés à gérer leurs invendus et à repenser la fin de vie des produits. On les aide à vendre les marchandises en limite de péremption puis à les donner à des associations ou à des filières de recyclage.

Quel profil recrutez-vous ?

Phenix recrute régulièrement dans toute la France. La structure existe depuis 2014 et nous sommes déjà 80 salariés dans 20 villes. Nous recrutons surtout des chargés de projet gaspillage alimentaire. Nous cherchons des diplômés d’école de commerce, ingénieur ou même de l’université avec un profil très opérationnel, beaucoup de bon sens, de pragmatisme et capable de s’adapter vite. Nous recrutons souvent à l’issu des stages.

Qu’est-ce que le Phenix Lab ?

C’est un laboratoire qui accueille tous les projets qui luttent contre le gaspillage. Nous offrons aux porteurs de projet un soutien opérationnel et stratégique. Nous leur apportons notre expérience et notre réseau et nous les aidons à grandir.

Valérie François © CIDJ
Article mis à jour le 23-11-2018 / créé le 04-12-2017